Nous vous proposons deux lectures éclairantes pour cette rentrée des classes : « La civilisation du poisson rouge » de Bruno Patino et « Le bug humain » de Sébastien Bohler.
« La civilisation du poisson rouge », Bruno Patino
Bruno Patino est directeur éditorial d’Arte France et doyen de l’école de journalisme de Sciences Po. Il met en garde contre les heures passées devant le smartphone, les dizaines d’activation par heure, les centaines de messages, sollicitations, informations, rumeurs, photos, etc…l’appareil qui nous happe…
Nous vous proposons les premières lignes de ce livre incontournable pour comprendre l’emprise des écrans sur notre vie quotidienne et trouver des pistes pour un projet retrouvant l’idéal humain :
« Sur l’estrade, l’homme est confiant, fier de sa trouvaille. Derrière lui, un écran. Sur cet écran, immense, un magnifique poisson rouge, l’œil rivé à son bocal et l’œil rond du poisson procure sur l’assistance un effet hypnotique. L’homme qui fait la présentation a tout du hipster cool mais chic… il porte tous les signes extérieurs de la réussite mondiale, de la pression supportée et du confort matériel associé à la vive intelligence. Il est sûr de lui. C’est normal, c’est un Googler, un employé de Google. Avec beaucoup d’autres, il est venu de Mountain View, le siège de l’entreprise la plus puissante du monde, pour porter la bonne parole du géant numérique devant un groupe d’Européens travaillant dans différents médias… La salle attend la révélation de l’homme de la firme. Manifestement, cela a demandé de l’imagination, du temps et, bien sûr, la formidable puissance de calcul informatique requise par l’intelligence artificielle. Derrière ce mot magique, il n’y a que des données et des formules mathématiques qui permettent, petit à petit, à une machine d’apprendre à reconnaître, à analyser, à trouver des explications. Mais pour que cela fonctionne, il faut de milliards et des milliards de données, intelligemment agencées par des milliers d’ingénieurs.
L’homme parle du poisson rouge sur l’écran géant. De cet animal stupide qui tourne sans fin dans son bocal…et l’homme annonce que son entreprise a réussi à calculer le temps d’attention du poisson rouge. Le fameux attention span. Et celui-ci est effectivement dérisoire : l’animal est incapable de fixer son attention au-delà de 8 secondes. Après ces 8 petites secondes, il passe à autre chose et remet à zéro son univers mental.
Reste que l’homme n’en a pas fini de ses annonces. Les ordinateurs de Google ont également réussi à estimer le temps d’attention des millennials, ceux qui sont nés avec la connexion permanente et ont grandi avec un écran tactile au bout des doigts… Le temps d’attention, la capacité de concentration de cette génération, annonce l’homme, est de 9 secondes. Au-delà, son cerveau, notre cerveau, décroche. Il lui faut un nouveau stimulus, un nouveau signal, une nouvelle alerte, une autre recommandation… »
En espérant que ces quelques lignes vous donneront envie d’en continuer la lecture…et de découvrir les propositions de Bruno Patino pour « combattre et guérir » !
« Le bug humain », Sébastien Bohler
A l’aube d’une catastrophe environnementale et sociétale annoncée, où malgré l’urgence et la conscience de ce danger, nous ne parvenons pas à agir collectivement, Sébastien Bohler, Docteur en neurosciences et rédacteur en chef du magazine « Cerveau et Psycho » apporte dans cet ouvrage un éclairage nouveau à cette question cruciale de notre avenir, de celui de la planète et de notre responsabilité.
Mettant à distance la soif de pouvoir et de domination de l’homme, l’auteur s’intéresse plutôt à comprendre certains mécanismes de notre cerveau en relation avec nos comportements et notre relation au monde actuel.
Il nous explique qu’au cœur de notre cerveau, un petit organe, le striatum, régit certains de nos comportements avec pour seul objectif, la survie de notre espèce, à savoir : manger, se reproduire, acquérir du pouvoir, agrandir son territoire et s’imposer face à autrui en cas de danger.
Pour autant, ces comportements archaïques, fruits de l’évolution qui, il y a 200 000 ans, ont permis à l’humanité de conquérir le monde, s’avèrent aujourd’hui totalement inappropriés face aux nouvelles problématiques sociétales et environnementales.
Peut-on résoudre ce « bug » humain ?
Assurément oui d’après l’auteur, même si le défi est de taille, et ce grâce à la plasticité cérébrale qui se définit par la capacité qu’a le cerveau à se réorganiser en permanence.
Nous sommes ainsi en capacité d’adopter en conscience de nouveaux comportements adaptés aux défis du monde actuel, câblant ainsi de nouveaux réseaux neuronaux ; en capacité aussi de les transmettre par l’éducation en réapprenant la patience, la modération, la collaboration et en mettant en valeur la connaissance.
Redevenant maître à bord nous pourrions envisager plus sereinement l’avenir !
Et l’auteur de conclure : » C’est à la société entière de mettre à l’honneur la connaissance et ses figures de proue, de manière à la rendre attractive et valorisante pour nos cerveaux »
Un livre à lire absolument !